
William Kentridge, image fixe tirée de More Sweetly Play the Dance, 2015, installation vidéo 8 canaux haute définition, 15 min, avec 4 porte-voix. Musée des beaux-arts du Canada, Ottawa. Acheté en 2016. © William Kentridge avec la permission de la Marian Goodman Gallery
William Kentridge : More Sweetly Play the Dance
Vivez l’expérience de cette œuvre politique multisensorielle à succès au Musée des beaux-arts du Canada.
More Sweetly Play the Dance, de l’artiste sud-africain William Kentridge, encercle les spectateurs dans une parade de personnages apparemment sans fin. Véritable procession dansante de dessins animés et de vidéos, la frise longue de 35 mètres d’images et de son en mouvement nous invite à entrer dans une danse macabre tout en nous donnant l’occasion de réfléchir aux notions d’injustice et d’inhumanité.
"Je m’intéresse à l’art politique, c'est-à-dire un art de l’ambiguïté, de la contradiction, de gestes inaboutis et d’issues aléatoires. Un art (et une politique) dans lequel l’optimisme est bridé et le nihilisme tenu à distance. Le film lui-même […] s’insère dans une série de projets qui traitent de désespoir en cette ère de disparition des utopies…" William Kentridge
William Kentridge, vue d’installation de More Sweetly Play the Dance, 2015 à la Marian Goodman Gallery, New York, 2016, installation vidéo 8 canaux haute définition, 15 min, avec 4 porte-voix. Musée des beaux-arts du Canada, Ottawa. Acheté en 2016. © William Kentridge avec la permission de la Marian Goodman Gallery. Photo : Cathy Carver

William Kentridge, image fixe tirée de More Sweetly Play the Dance, 2015, installation vidéo 8 canaux haute définition, 15 min, avec 4 porte-voix. Acheté en 2016. Musée des beaux-arts du Canada, Ottawa. © William Kentridge avec la permission de la Marian Goodman Gallery
William Kentridge : « More Sweetly Play the Dance », la grande scène du monde
Le premier personnage qui apparaît danse. Il tourne autour de la pièce à travers chacun des écrans. Ensuite, c’est au tour d’un homme qui avance solennellement, jetant des feuilles de papier par-dessus sa tête en marchant. Le suit un porte-drapeau dont l’enseigne sous-entend la contestation. Puis, voici une fanfare de 21 membres. Sa musique exubérante enfle alors que d’autres groupes (malades du virus Ebola, politiciens, mineurs, ecclésiastiques, squelettes) entrent en scène sur la gauche, paradent autour de l’espace d’exposition, puis sortent lentement du cadre.

William Kentridge, vue d’installation de More Sweetly Play the Dance, 2015 à la Marian Goodman Gallery, New York, 2016, installation vidéo 8 canaux haute définition, 15 min, avec 4 porte-voix. Musée des beaux-arts du Canada, Ottawa. Acheté en 2016. © William Kentridge avec la permission de la Marian Goodman Gallery Photo : Cathy Carver
La nature de leur procession reste obscure. Est-elle festive? Religieuse? Protestataire? Militaire? Politique? Funéraire? Peut-être un peu tout cela à la fois.
L’œuvre, du maître sud-africain du multimédia William Kentridge, est une installation vidéo panoramique à huit canaux intitulée More Sweetly Play the Dance (2015). Acquise par le Musée des beaux-arts du Canada en 2016, elle est maintenant présentée à Ottawa pour la toute première fois, dans une installation sur sept écrans conçue par Kentridge et Josée Drouin-Brisebois, conservatrice principale de l’art contemporain.

William Kentridge, image fixe tirée de More Sweetly Play the Dance, 2015, installation vidéo 8 canaux haute définition, 15 min, avec 4 porte-voix. Acheté en 2016. Musée des beaux-arts du Canada, Ottawa. © William Kentridge avec la permission de la Marian Goodman Gallery
Pour Drouin-Brisebois, More Sweetly Play the Dance est l’« un des chefs-d’œuvre (de Kentridge) ». Grandeur nature, elle intègre nombre des disciplines pratiquées par l’artiste, avec une performance cinématographique en action réelle rappelant ses pièces de théâtre, des éléments sculpturaux (chaises et mégaphones disposés tout autour de l’espace, projetant des ombres sur le sol) et des animations au fusain image par image pour lesquelles le créateur est sans doute le plus connu, déployées selon une scénographie évolutive.
C’est une danse macabre immersive du XXIe siècle, une transposition de la tradition artistique de la fin de l’époque médiévale née au temps de la grande famine et de la peste, représentant la mort conduisant indistinctement nobles et paysans vers la tombe. Avec ses dactylos, manœuvres, éboueurs et autres personnes transportant leurs effets dans une évocation de la crise des réfugiés, Kentridge pige dans la société qu’il observe autour de lui de nos jours. C’est un spectacle du tout un chacun qui aujourd’hui vacille sur la grande scène du monde. Et dans cette marche sans fin, il y a un regard sur les gens qui composent notre population, leurs besoins et la mesure dans laquelle notre notion collective de « progrès » a répondu à ceux-ci.

William Kentridge, image fixe tirée de More Sweetly Play the Dance, 2015, installation vidéo 8 canaux haute définition, 15 min, avec 4 porte-voix. Acheté en 2016. Musée des beaux-arts du Canada, Ottawa. © William Kentridge avec la permission de la Marian Goodman Gallery
Des processions comme celles-ci sont une sorte de thème récurrent à travers l’œuvre de l’artiste. Kentridge est né à Johannesburg durant l’apartheid, alors que de nombreuses réunions de plus de 10 personnes étaient interdites par la loi (ses parents, il faut le mentionner, étaient des avocats anti-apartheid de premier plan; son père a défendu Nelson Mandela). Les processions étaient donc une manifestation de contestation. « Les processions sont devenues une manière de symboliser la liberté, la résistance et aussi l’espoir », explique Drouin-Brisebois. Dans le paradigme de Kentridge, l’acte incarne « la démocratie » et « la liberté humaine fondamentale ».
En fait, la première œuvre de Kentridge acquise par le Musée était une installation sculpturale en bronze de 26 pièces intitulée Le cortège (1999–2000). Les personnages, dont beaucoup apparaissent dans d’autres créations de l’artiste, avancent d’un pas pesant sur la longue planche de bois. Certains semblent brisés par l’épuisement, d’autres ont l’air de danser. L’œuvre a récemment été présentée dans l’exposition William Kentridge: Procession au Musée des beaux-arts de l’Alberta, aux côtés de More Sweetly Play the Dance et d’une troisième œuvre de Kentridge faisant partie de la collection du Musée des beaux-arts du Canada, What Will Come (2007).

William Kentridge, What Will Come, 2007. film n/b 35 mm reporté sur vidéodisque numérique (DVD), 8 min 40 s, table en acier laminé à froid et cylindre en acier poli de 6 mm, installation aux dimensions variable. Musée des beaux-arts du Canada, Ottawa. © William Kentridge Photo: MBAC
What Will Come est une animation anamorphique, dans laquelle les images projetées sur un plateau circulaire en acier apparaissent déformées jusqu’à ce qu’on les regarde dans le reflet d’un cylindre en acier poli fixé au centre. Avec des dessins au fusain emblématiques de Kentridge, le film présente des images inspirées par la guerre d’Abyssinie de 1935–1936, quand les troupes italiennes ont attaqué, par traîtrise et en violation des conventions de Genève, l’Abyssinie (l’actuelle Éthiopie), utilisant des gaz toxiques. L’animation tourne comme un manège forain et est accompagnée de bruits de foire ponctués d’une chanson de route populaire auprès des fascistes de Mussolini. Vers la fin du film, un défilé se forme, que Kentridge décrit comme une « horde tapageuse (prenant) d’assaut l’univers ». Le titre de l’œuvre vient d’un dicton ghanéen selon lequel ce qui va arriver est déjà là.
Cette circularité, également, est un thème chez Kentridge, comme la marche de More Sweetly Play the Dance qui fait une boucle et encercle le spectateur, créant une procession universelle et permanente d’allégresse et de terreur et de tout ce qui sépare les deux. « L’idée de progrès est une notion dont [l’artiste] est assez critique », précise Drouin-Brisebois. Peut-être, alors, que la « marche » légendaire va « toujours de l’avant » non parce qu’elle foule des terres nouvelles, toujours plus loin telle une flèche, mais parce qu’elle tourne en boucle sur elle-même. La procession, probablement, se termine où elle commence, et le même ballet se répète à travers les âges.
Installation
L’installation est un déploiement d’objets ou de sculptures dans un espace formant un tout.
Lorsque l’œuvre est spécialement conçue pour un lieu et entre en relation avec celui-ci, elle est nommée « in situ ». Voir la définition d'in situ.
Contemporain
Désigne l'art de son époque. Ainsi, l'art contemporain de ses parents n'est pas la même que le sien, ni plus tard que celui de nos enfants.
D'une manière plus globale, l' « art contemporain » désigne l'ensemble des œuvres produites depuis 1945 à nos jours. Dans cette classification, l'art contemporain succède à l'art moderne (1850-1945). Cette désignation s'applique également aux musées, institutions, galeries, foires, salons, biennales montrant les œuvres de cette période.
Performance
La performance est une pratique qui définit une oeuvre par le moment de sa réalisation, c’est une oeuvre sous forme "d’évènement". L'artiste ne produit plus une peinture, un dessin ou une sculpture mais propose une action au public. Il est possible de connaître des performances par les traces mémorielles (vidéos, photographies, témoignages) que les artistes, commissaires d'exposition ou encore le public en ont gardées.
La performance se construit en réalisant une idée par un geste. Elle a historiquement toujours eu pour but de mettre en scène une forme d’expérimentation, d’ouvrir de nouveaux champs de recherche et d’engagement, de transgresser la norme, de questionner la production artistique et d’engager le spectateur dans le processus.
La performance a permis d’ouvrir un espace extrêmement large de pratiques interdisciplinaires et de croisement de ces pratiques avec les nouveaux médias. L’histoire de la performance a plus de 100 ans. Elle commence avec les premières actions des artistes du mouvement Dada et continue jusqu’aux performances engagées de la décennie 60-70 et continue jusqu’à nos jours. La réémergence de la performance dans la période qui a suivi la deuxième guerre mondiale, telle que décrite par l’artiste américain Robert Rauschenberg, traduit le désir de "combler le fossé entre l’art et la vie".
Cette intention se caractérise par un intérêt essentiel pour la société et pour la vie quotidienne, poussant le spectateur au coeur du travail artistique et, inversement, le travail artistique
Espace
L’espace est celui dans lequel l’œuvre s’inscrit matériellement. Il est donc essentiel de rencontrer des œuvres de visu afin de prendre conscience de leur existence matérielle au-delà des reproductions qui sont diffusées. En sculpture, on sera particulièrement attentif aux relations entre la matière et l’espace, dans lequel l’œuvre s’inscrit. De même, l’œuvre peut être conçue directement en relation au lieu dans lequel elle s’inscrit : en Land Art, certaines œuvres du Street Art, un retable, etc.
- L’espace est celui de l’artiste qui crée l’œuvre. Celui-ci est acteur avec son corps, il agit, bouge, évolue lorsqu’il réalise l’œuvre. Jackson Pollock effectue quasiment une danse lorsqu’il crée, Richard Long arpente le paysage dans lequel il crée.
- L’espace est celui du spectateur. « On ne regarde pas de la même manière une miniature, vue de près dans une sorte d’intimité, et une très grande peinture, qu’il faut prendre du recul pour bien voir ». Etienne Souriau, Vocabulaire d’esthétique, Éditions PUF, p. 685
Le spectateur peut être amené à tourner autour d’une sculpture, déambuler dans une installation etc.
- L’espace est enfin celui de l’œuvre. Celui-ci peut être un espace représenté : « Un tableau peut représenter une tranche minime d’espace (dans un portrait, une nature morte) ou de grandes profondeurs, comme un paysage aux vastes horizons. » Etienne Souriau, Vocabulaire d’esthétique, Éditions PUF, p. 687
- L’espace est également celui du tableau, comme le souligne le peintre Maurice Denis : « se rappeler qu’un tableau, avant d’être un cheval de bataille (...) ou une quelconque anecdote, est essentiellement une surface plane recouverte de couleurs en un certain ordre assemblées ».
Voir le document sur le lexique des 9 notions en arts plastiques sur Eduscol
Bronze
Alliage composé de cuivre et d’étain. Il est souvent utilisé pour reproduire par coulage dans un moule des sculptures dont les originaux sont en plâtre, en terre ou en tout autre matériau. La couleur du bronze peut varier de l’or au brun en passant par le vert, selon la proportion de ses composants.
Voir aussi à sculpture, moulage, pratiques tridimensionnelles.
Série
Temps
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Le temps peut être lié à la narration. La narration est l’acte de langage par lequel on raconte quelque chose. Les éléments du langage des arts plastiques permettent ainsi de raconter de manière visuelle. La relation entre narration et temps est évidente dans un film, une vidéo ou une bande dessinée (accélération ou ralentissement dans la narration). La Tapisserie de Bayeux, 70 mètres de long, réalisée au XIe siècle retrace l’histoire mouvementée de la conquête du trône d’Angleterre par Guillaume le Conquérant.
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Le temps représenté dans l’œuvre peut être suggéré par un mouvement, la vitesse, par une répétition d’un même personnage évoquant un déplacement (dans les œuvres du mouvement futuriste, par exemple). Le temps peut être arrêté tel un instantané photographique (Le Sacre de Napoléon, David 1806-1807). L’œuvre peut rendre compte de moments fugaces (Série des Meules, Monet, plus d’une vingtaine de toiles vers 1890).Dans le cas d’une image fixe, le spectateur (re)construit mentalement le récit, à partir d’une répétition de formes, la mise en scène de personnages, le hors champ, une action arrêtée, une profusion de détails, une succession d’événements, l’organisation dans l’espace de l’œuvre etc. Il est possible également de faire cohabiter plusieurs temps dans un même espace, comme cela est l’usage dans les représentations du Moyen Âge.
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Le temps est également celui de la création de l’œuvre, pouvant être rendu lisible par l’artiste. Il est également celui qui s’écoule depuis la création de l’œuvre, qui peut occasionner des changements, parfois voulus comme dans certains bâtiments en architecture par exemple ou encore des altérations nécessitant une restauration.
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Le temps est celui de la contemplation de l’œuvre par le spectateur.
Voir aussi à temporalité
Voir le document sur le lexique des 9 notions en arts plastiques sur Eduscol
Image
L’image est une représentation de quelque chose ou de quelqu’un par un procédé manuel (le crayon, la peinture, etc.) ou mécanique (l’appareil photographique, vidéo …). C’est aussi une représentation imprimée où ce qui est reproduit ou imité évoque quelque chose ou quelqu’un.
On distingue deux grandes familles d’images : l’image fixe et l’image animée ou mobile.
L’image virtuelle est une image qui n’a pas d’existence propre, issue d’une projection lumineuse ou d’un reflet. L’image numérique est une image scannée, stockée, diffusée ou imprimée par un ordinateur. L’image de synthèse est une image numérique qui est totalement créée par des calculs informatiques.
Voir aussi à statut de l'image
Plan
Dans une peinture, partie définie par sa distance au spectateur. Les plans suggèrent un espace en profondeur. Le premier est celui qui se trouve le plus en avant par rapport au point de vue du spectateur, les autres s'échelonnent dans la profondeur jusqu'à l'arrière-plan.
Au cinéma, le plan est une unité de temps, une prise de vues, comprise entre la mise en marche de la caméra et son arrêt. Pour simplifier, le plan est la scène filmée entre les deux mots magiques du tournage, « Action ! » et « Coupez ! ». Un ensemble de plans situés dans le même temps et dans le même lieu est une séquence. En résumé, le plan est le morceau de film tourné sans interruption et sélectionné au montage entre deux raccords.
En architecture, le plan de sol est une vue de dessus qui représente la disposition des espaces dans un bâtiment, à la manière d'une carte, pour un étage du bâtiment. C'est une section horizontale d'un bâtiment (à un mètre au-dessus du sol), représentant notamment les murs, les portes et les fenêtres. Le plan de masse est destiné à montrer une vue d'ensemble d'un projet, du dessus, incluant les limites de propriété, les accès, et les structures environnantes et les connexions aux réseaux (eau, électricité, communications...).
Voir aussi à échelle des plans.